La nouvelle traduction en français du Missel Romain
La nouvelle traduction en français du Missel Romain Travail réalisé par G. Nicole à partir d’un texte du journal Le Pèlerin.
Après le Concile Vatican II l’Eglise s’est dotée d’un nouveau Missel pour les messes. Il était écrit en latin. Chaque langue en a donné une traduction. La dernière traduction en langue française remontait à une quarantaine d’années. Les évêques de la francophonie ( France, Belgique, Luxembourg, Suisse, autres pays de langue française viennent de nous donner une nouvelle traduction, plus proche du texte latin. Je présente ici les principales modifications.
Ouverture de la messe.
Avant : (prêtre) « La grâce de Jésus notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père, et la communion de l’Esprit Saint, soient toujours avec vous.»
Maintenant : «La grâce de Jésus, le Christ , notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père, et la communion de l’Esprit Saint soient toujours avec vous.»
Pourquoi? L’ édition latine parlait de Christi sans que la traduction française ne garde ce titre. La nouvelle traduction rétablit Christi en précisant Jésus le Christ et non « Jésus Christ » pour être sûr que l’on prononce le « t ». Sinon, on entend « Jésus crie » question de sonorité. Mettre le Christ c’est aussi rappeler que Christ n’est pas le nom de famille de Jésus mais un titre,
Avant ( le prêtre) «Préparons-nous à la célébration de l’Eucharistie en reconnaissant que nous sommes pécheurs.»
Maintenant : « Frères et sœurs , préparons-nous à célébrer le mystère de l’Eucharistie, en reconnaissant que nous avons péché .»
Pourquoi? «Il n’y a pas le terme « sœur », en latin. Pour tenir compte des femmes dans les assemblées, il a été rajouté.
En latin, la traduction littérale est « Préparons-nous à célébrer les saints mystères ». Le mot mystère a été rajouté pour marquer l’importance de ce sacrement par lequel Dieu vient à notre rencontre. La messe plus qu’un rite est une rencontre de Dieu et des hommes en J-C.
La nouvelle traduction dit que nous avons commis des péchés. C’est différent qu’ être pécheurs. Le péché n’appartient pas à notre identité, à notre nature. Par contre c’est vrai que nous faisons des péchés.
Avant : (peuple) «Je confesse à Dieu tout-puissant, je reconnais devant mes frères, que j’ai péché. (…) C’est pourquoi je supplie la Vierge Marie, les anges et tous les saints, et vous aussi, mes frères, de prier pour moi le Seigneur notre Dieu».
Maintenant : «Je confesse à Dieu tout-puissant, je reconnais devant vous, frères et sœurs , que j’ai péché. (…) C’est pourquoi je supplie la bienheureuse Vierge Marie, les anges et tous les saints, et vous aussi, frères et sœurs , de prier pour moi le Seigneur notre Dieu».
Pourquoi? «Le missel latin contient le très beau terme de bienheureuse ( beatam ). C’est le titre traditionnel de Marie, le plus fréquent dans le missel latin, « Bienheureux », c’est les Béatitudes; ce terme rattache davantage à l’Evangile.
Avant : (prêtre) «Seigneur Jésus, envoyé par le Père pour guérir et sauver les hommes, prends pitié de nous. (peuple) Prends pitié de nous.»
Maintenant : «Seigneur Jésus, envoyé pour guérir les cœurs qui reviennent vers toi : Seigneur, prends pitié. (peuple) Seigneur, prends pitié. »
Pourquoi? «Dans cette troisième formule de la demande de pardon, cœur était présent dans le texte latin initial. Sa ré-introduction situe la conversion et la réconciliation dans ce centre de nous-même qu’est le cœur, lieu de l’amour, de la volonté, Cette nouvelle formule qui efface « les hommes », a aussi l’avantage d’être plus inclusive. Les femmes aussi peuvent être sauvées ! »
Avant : (peuple) «Toi qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous, toi qui enlèves le péché du monde, reçois notre prière.»
Maintenant : «Toi qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous, toi qui enlèves les péchés du monde, reçois notre prière».
Pourquoi? «Le latin peccata est bien un pluriel. Pourtant les traducteurs l’avaient remplacé par un singulier en s’inspirant d’une formule de Jean Baptiste dans l’Evangile: « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Dans l’Evangile en grec, péché est au singulier. Mais des traditions ultérieures se sont éloignées du grec et pour la traduction latine ont choisi le pluriel, peut être pour rappeler,qu’il y a plusieurs formes de péché : personnel, collectif, économiques, sociaux, sexuels. Comme la mission des traducteurs étaient de revenir à l’original latin, ils ont gardé peccata, le pluriel. Les deux formules ont chacune leur intérêt.. De même, avant la communion, il faudra aussi dire « Agneau de Dieu, qui enlèves les péchés du monde ».»
Avant : (prêtre) «Par Jésus-Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu, qui règne avec toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles.»
Maintenant : «Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur, qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit , Dieu , pour les siècles des siècles.»
Pourquoi? L’original latin avait le verbe vivre ( qui vit). On s’adresse au Christ vivant, ressuscité, et pas seulement au Christ-Roi qui règne. Il avait probablement disparu pour des raisons de liaison sonore disgracieuse: « vit et » prononcé « vite ». Les traducteurs avaient donc choisi le verbe régner Mais comme il est pourtant autorisé, en français, de ne pas faire la liaison avant le « et » les nouveaux traducteurs ont rétabli « vit et » à la conclusion brève de la prière sur les offrandes et après la communion.»
Liturgie de la parole
Avant: «Je crois en un seul Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre, (…) Engendré non pas créé, de même nature que le Père».
Maintenant : «Je crois en un seul Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre, (…) Engendré non pas créé, consubstantiel au Père ».
Pourquoi? L’adjectif consubstantiel est apparu au Vième siècle quand les premiers chrétiens essayaient d’exprimer le plus justement possible les relations de Jésus avec Dieu et avec les hommes. Pour dire que Jésus est Dieu comme le Père ils ont utilisé l’adjectif consubstantiel : de la même substance. Tout ce que Dieu-le-Père est, le Fils l’est équivalemment. Les évêques en 1964 ont traduit consubstantiel par de même nature. Ce n’est pas faux mais pas suffisant pour dire l’unité du Père et du Fils : nous autres êtres humains, nous sommes de la même nature humaine et portant nous ne sommes pas un comme le Père et le Fils le sont. Cet adjectif consubstantiel cherche à exprimer ce qu’il y a de « même » entre le Père et le Fils : de même nature, coégal, un, unique, indivisible. Il n’y a pas trois dieux mais un seul Dieu en trois personnes.
NB : Je précise que dans le Credo, l’adjectif » catholique » ne veut pas dire l’Eglise des Catholiques ( comme on dirait l’Eglise des Protestants ou des Orthodoxes). Ici » catholique « veut dire universel. L’Eglise du Credo c’est l’Eglise Universelle. »
Liturgie eucharistique
Avant: (prêtre) «Tu es béni, Dieu de l’univers, toi qui nous donnes ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes; nous te le présentons: il deviendra le pain de la vie.»
Maintenant : «Tu es béni, Seigneur , Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le pain que nous te présentons , fruit de la terre et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le pain de la vie.»
Pourquoi? «Les modifications traduisent plus fidèlement le latin. Le latin parle bien de largitate , largesse en français, ou encore de bonté.»
Avant: (prêtre) «Prions ensemble, au moment d’offrir le sacrifice de toute l’Eglise» (peuple) «Pour la gloire de Dieu et le salut du monde»
Maintenant : (optionnelle, le prêtre peut garder l’ancienne formule) « Priez, frères et sœurs : que mon sacrifice, qui est aussi le vôtre, soit agréable à Dieu le Père tout-puissant. »(peuple) « Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Eglise. »
Pourquoi? La formule que nous avons depuis quarante ans est très bien frappée, très belle. Les autres pays nous l’envient. Mais elle est très éloignée de la formule latine. La nouvelle formule française cherche à se rapprocher de la formule originale en latin. Les traducteurs ont cependant demandé au pape François de pouvoir conserver l’ancienne traduction. Cette nouvelle traduction montre bien également que le prêtre est là pour offrir au Père ( par le Fils et dans l’Esprit) le sacrifice, l’offrande de tout le Peuple de Dieu. La messe est un même sacrifice, une même offrande du Peuple de Dieu, du prêtre, du Christ.
Avant : «(prêtre) Il est grand, le mystère de la foi: (peuple) Nous proclamons ta mort, Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire.»
Maintenant : «(prêtre) Il est grand, le mystère de la foi : (peuple) Nous annonçons ta mort, Seigneur Jésus, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire.»
Pourquoi ?
Il y a une progression dans l’original latin que la traduction française rendait mal.
La mort est un événement de l’histoire qu’il est possible d’annoncer comme un événement historique. La résurrection est d’un autre registre : c’est dans la foi qu’on l’annonce comme une bonne nouvelle. On la proclame comme un évangile. Nous attendons le retour de Jésus à la fin des temps. Attendre c’est une marque de notre espérance
Avant: (prêtre) «Délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre temps; par ta miséricorde, libère-nous du péché, rassure-nous devant les épreuves en cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l’avènement de Jésus Christ, notre Sauveur»
Maintenant : «Délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre temps: soutenus par ta miséricorde, nous serons libérés de tout péché , à l’abri de toute épreuve ; nous qui attendons que se réalise cette bienheureuse espérance : l’avènement de Jésus Christ, notre Sauveur».
Pourquoi? «Cette traduction a été très difficile. Le latin dit littéralement « attendant la bienheureuse espérance et l’avènement de notre sauveur Jésus Christ ». En français, on n’attend pas une espérance, mais l’objet d’une espérance. Ils ont donc ajouté « que se réalise » et retiré le « et » entre « espérance » et « avènement » car il s’agit de la même chose, pas de deux choses différentes.
Avant : (prêtre) «Heureux les invités au repas du Seigneur! Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde.»
Maintenant : «Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde. Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau !»
Pourquoi? « Les traducteurs ont repris l’ordre de succession des phrases de l’édition latine.
La belle formule « Heureux les invités au repas du Seigneur »était empruntée à la première lettre de Paul aux Corinthiens. Mais le missel latin s’inspire de l’Apocalypse: il parle du repas des noces de l’Agneau. Littéralement, il s’agit du « repas de l’agneau ». Les traducteurs ont ajouté « noces ».